OrientXXI publie le droit de réponse d’ASIDCOM à une chercheuse CNRS
Droit de réponse d’ASIDCOM à l’article de Mme Bergeaud-Blackler « Les dessous de la norme halal européenne » paru sur Orient XXI le 18 juin 2015
Critiquant le communiqué signé par les acteurs musulmans français [1], dont l’Association de sensibilisation, d’information et de défense du consommateur musulman (Asidcom), qui ont dénoncé le projet actuel du Centre européen de normalisation (CEN) visant la création d’une norme halal, l’auteure écrit :
« les signataires parlent au nom des “autorités musulmanes” ».
En dénonçant ce projet, ASIDCOM tient à préciser que, contrairement aux dires de l’auteure, elle ne fait en réalité qu’agir conformément à son statut d’association agréée de défense de consommateurs musulmans. Qu’y a-t-il de plus légitime pour notre association que de réaffirmer, à travers ce communiqué, que la mention « halal », qui identifie les produits conformes à la loi musulmane, est un concept strictement religieux qui obéit à des normes prescrites par l’islam insusceptibles d’appropriation à des fins économiques par des organismes privés ?
L’auteure de l’article allègue, en outre, que l’objectif desdits acteurs musulmans « n’est pas de dénoncer le dispositif (de normalisation du halal) mais plutôt de le contrôler » : or, ASIDCOM a une action indépendante et totalement désintéressée, conformément aux stipulations de sa charte. Son but exclusif est d’assurer la défense des droits fondamentaux des consommateurs musulmans, dont leur droit à une alimentation halal conforme aux prescriptions religieuses. C’est cette motivation qui a présidé à la signature du communiqué précité par notre association et non une prétendue volonté de contrôle.
Par ailleurs, l’auteure semble reprocher aux acteurs musulmans précités, dont ASIDCOM, « une stratégie de publicisation du problème pour faire pression sur le CEN ». ASIDCOM rappelle que l’information et la sensibilisation du consommateur est un des moyens d’action légitime et statutaire de toute association de défense de consommateurs ! Pourquoi en dénier la possibilité à une association de défense de consommateurs musulmans ?
Poursuivant dans sa critique du positionnement des acteurs musulmans, dont ASIDCOM, l’auteure écrit également : « Ce sont eux qui, un an et demi après le démarrage du processus normatif, signent ce communiqué. Ils ne cherchent à dénoncer ni l’absurdité, ni la légitimité, ni même la légalité du dispositif. »
Or, Madame Bergeaud-Blackler semble oublier ou ne faire aucun cas des diverses démarches et prises de position critiques d’ASIDCOM vis-à-vis du projet de norme européenne, dont voici quelques exemples à titre illustratif : l’association a désapprouvé fondamentalement ce projet de normalisation dès le départ en janvier 2010 (Cf. formulaire retourné à l’AFNOR), puis en 2012 (l’instruction I81/2012) ; au sein des travaux de la commission AFNOR, ASIDCOM a qualifié d’ingérence dans le culte musulman l’inscription du CFCM et des trois mosquées dans la catégorie « support technique » ( cf. les comptes rendus de la commission) ; elle a également dénoncé au sein de la commission la volonté de définir l’abattage rituel par référence aux pratiques industrielles au lieu des prescriptions religieuses ; elle a de même écrit au président de l’AFNOR lui exposant les problèmes d’incompatibilité du cadre juridique et les problèmes de fonctionnement de l’AFNOR et du CEN par rapport à la question religieuse du halal ; ASIDCOM n’exclut pas du reste la piste éventuelle du recours à la justice pour défendre les droits fondamentaux des consommateurs musulmans.
Enfin, pour l’auteure de l’article, ASIDCOM serait « un activiste religieux » représentant un courant particulier « de la sphère d’influence frériste » [2].
Notre association tient à réfuter cette allégation dénuée de toute vérité. On aurait pu, à cet égard, s’attendre de la part de l’auteure à une argumentation soutenue de ce propos visant à disqualifier notre association. Rien de tel cependant dans son article : l’auteure se borne à renvoyer à une note de bas de page indiquant lapidairement que « la présidente d’ASIDCOM a suivi un enseignement religieux à l’Institut européen des sciences humaines (IESH), organisme de formation de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) » : cela semble suffire à l’auteure pour justifier son assertion.
Or, il est d’évidence que les études dispensées dans des établissements/universités islamiques en France forment un tronc commun des sciences islamiques [3] ; suivre de telles études pour se former — en l’espèce par correspondance s’agissant de la présidente d’ASIDCOM — ne saurait valoir à l’impétrant, ipso facto, une étiquette d’appartenance à un courant religieux, en l’occurrence celui des Frères musulmans. C’est pourtant le raccourci auquel l’auteure cède. À titre informatif, Mme Rezgui-Pizette, présidente d’ASIDCOM, consacre son activité associative à la défense des consommateurs musulmans et à l’enseignement. Elle n’exerce aucune activité politico-religieuse conformément aux principes de l’association et à sa charte. ASIDCOM, par son conseil d’administration, ses 850 adhérents et ses sympathisants embrasse, pour sa part, toutes les sensibilités musulmanes en France, y compris parmi les acteurs associatifs et représentants du culte.
[1] Il s’agit du Conseil français du culte musulman (CFCM), des mosquées de Lyon et d’Évry, des certificateurs (Halal Service, AVS), deux associations de consommateurs musulmans — l’Association de sensibilisation, d’information et de défense de consommateurs musulmans (ASIDCOM) et l’Union française des consommateurs musulmans (UFCM) et un commerçant (Sirat).
[2] Le terme « frériste », bien qu’utilisé ici dans un sens péjoratif, semble relater le courant des Frères musulmans
[3] L’étude des sciences religieuses est recommandée à chaque musulman, selon la tradition prophétique : « Allez chercher la science même en Chine », « la recherche de la science est une obligation pour chaque musulman et chaque musulmane », « cherchez la science du landau et jusqu’à la fin de votre vie ».